Réforme de la bioéthique : la circulaire !
La circulaire très attendue de présentation des dispositions en matière d’assistance médicale à la procréation issues de la loi n°2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique est parue au Bulletin officiel du 23 septembre 2021. En attendant le dossier AJ famille qui sera publié au mois d’octobre, je vous invite à la lire. Elle contient un certain nombre de précisions indispensables à la bonne compréhension de la loi, même s’il demeure un certain nombre d’interrogations…
La loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique élargit l’accès aux techniques déjà disponibles en matière de procréation médicalement assistée (PMA).
L’article 1er étend l’accès à l’assistance médicale à la procréation (AMP) aux couples de femmes et aux femmes seules dès lors qu’elles ne sont pas mariées. En outre, les critères médicaux liés à l’infertilité pathologique médicalement constatée ou à la transmission d’une maladie d’une particulière gravité (à l’enfant ou à l’autre membre du couple), qui conditionnaient l’accès à l’AMP, sont supprimés.
La condition de stabilité du couple (mariage ou preuve d’une vie commune d’au moins deux ans) a été supprimée par la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique.
Le recours à l’AMP est désormais conditionné à l’existence d’un projet parental. Le nouvel article L. 2141-2 du code de la santé publique dispose que l’AMP « est destinée à répondre à un projet parental » et que «tout couple formé d’un homme et d’une femme ou de deux femmes ou toute femme non mariée ont accès à l’assistance médicale à la procréation après les entretiens particuliers des demandeurs avec les membres de l’équipe médicale clinicobiologique pluridisciplinaire effectués selon les modalités prévues à l’article L. 2141-10 ».
Ce projet parental peut être porté par :
- un couple de personnes de sexe différent, qu’elles soient mariées, liées par un pacte civil de solidarité ou vivant en concubinage ;
- un couple de femmes, quel que soit également leur statut conjugal ;
- une femme non mariée.
Ainsi, une femme célibataire, une femme vivant en concubinage ou une femme ayant conclu un pacte civil de solidarité peut recourir seule à l’assistance médicale à la procréation. Au contraire, une femme mariée ne peut valablement consentir seule à une AMP. Cette exclusion est destinée à éviter que son conjoint, qui n’a pas consenti à l’AMP, soit automatiquement désigné père de l’enfant par l’application de la présomption de paternité.
L’ouverture de l’AMP aux couples de femmes a nécessité l’adoption de dispositions nouvelles régissant la filiation et ses effets quant à la dévolution du nom de famille et à l’autorité parentale. Elle a permis une réorganisation des dispositions du code civil relatives à l’AMP avec tiers donneur.
A cet effet, l’article 6 de la loi ajoute, au sein du titre VII du livre Ier du code civil relatif à la filiation, un nouveau chapitre V intitulé « De l’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur » qui comprend les articles 342-9 à 342-13. Ce chapitre comprend, d’une part, des dispositions applicables à toutes les personnes ayant recours à l’AMP avec tiers donneur, qu’il s’agisse des femmes non mariées, des couples de femmes ou des couples formés d’un homme et d’une femme et, d’autre part, des dispositions particulières applicables aux conditions dans lesquelles la filiation est établie lorsqu’un couple de femmes a recours à l’AMP avec tiers En conséquence, la section 3 du chapitre Ier du titre VII, relative à l’AMP, qui regroupait les anciens articles 311-19 et 311-20 du code civil, est supprimée.
L’établissement de la filiation en cas de recours à l’AMP avec tiers donneur est régi par les règles suivantes :
- les règles relatives à l’établissement de la filiation pour un couple de personnes de sexe différent qui a recours à cette technique ne sont pas modifiées. Il s’agit des dispositions générales prévues par le titre VII du livre Ier du code civil : la filiation maternelle est établie à l’égard de la femme qui a accouché de l’enfant, par sa désignation dans l’acte de naissance de l’enfant, en application de l’article 311-25 du code civil, et la filiation paternelle s’établit soit par la présomption de paternité, soit par la reconnaissance ;
- lorsqu’une femme non mariée a recours seule à l’AMP avec tiers donneur, la filiation maternelle est établie de même, à savoir par sa désignation dans l’acte de naissance de l’enfant si elle a accouché de l’enfant, par application de l’article 311-25 du code ;
- lorsqu’un couple de femmes a recours à l’AMP avec tiers donneur, la filiation maternelle s’établit également, à l’égard de la femme qui a accouché de l’enfant, par sa désignation dans l’acte de naissance en application des mêmes Pour permettre et sécuriser
- l’établissement du second lien de filiation maternelle, l’article 6 de la loi de bioéthique crée, aux articles 342-11 et 342-12 du code civil, un nouveau mode d’établissement de la filiation : la reconnaissance conjointe anticipée.
Lors du consentement à l’AMP devant le notaire, les deux femmes reconnaissent l’enfant conjointement et par anticipation (c’est-à-dire avant l’insémination artificielle ou le transfert d’embryon). C’est la reconnaissance conjointe anticipée qui permettra d’établir la filiation à l’égard de la femme qui n’a pas accouché de l’enfant. Cette reconnaissance, remise à l’officier de l’état civil lors de la déclaration de naissance, sera mentionnée dans l’acte de naissance.
L’article 6 de la loi crée également un dispositif transitoire permettant aux couples de femmes ayant eu recours à une AMP à l’étranger avant l’entrée en vigueur de la loi, de faire établir la filiation à l’égard de la femme qui n’a pas accouché de l’enfant.
Le IV de l’article 6 prévoit ainsi que, pendant une durée de trois ans à compter de la publication de la loi, le couple de femmes qui a eu recours à une AMP à l’étranger avant la publication de la loi peut faire, devant notaire, une reconnaissance conjointe de l’enfant dont la filiation n’est établie qu’à l’égard de la femme qui a accouché. La reconnaissance conjointe ainsi réalisée établit la filiation à l’égard de l’autre femme. Cette reconnaissance conjointe sera inscrite en marge de l’acte de naissance de l’enfant sur instructions du procureur de la République qui s’assure du respect des conditions prévues au premier alinéa du IV de l’article 6.
Les quatre fiches annexées de la circulaire ont pour objet de présenter :
- les apports de la loi en matière de filiation dans le cas du recours à une AMP avec tiers donneur et notamment les dispositions spécifiques aux couples de femmes (fiche n° 1) ;
- le dispositif transitoire pour l’établissement du second lien de filiation maternelle à l’égard des enfants nés d’AMP réalisée à l’étranger par un couple de femmes avant la publication de la loi (fiche n° 2) ;
- les dispositions de coordination (fiche n° 3) ;
- les modalités d’établissement et de mise à jour des actes de l’éat civil relatifs aux enfants issus d’une AMP (fiche n° 4).
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