L'état d'urgence sanitaire sera prolongé jusqu'au 1er juin 2021

Les députés ont définitivement adopté, le 9 février 2021, le projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire. Déclaré à compter du 17 octobre 2020 sur l'ensemble du territoire national, l'état d'urgence sanitaire a permis au gouvernement de prendre des mesures destinées à faire face à l'épidémie de covid-19.

Compte tenu de l'évolution de la situation sanitaire, le gouvernement a estimé qu'il convenait de prolonger cet état d'urgence et de maintenir des mesures d'exception. En raison de la « caducité » de ce régime exceptionnel prévue par la loi du 23 mars 2020, qui a fixé la date d'extinction au 1er avril 2021, le gouvernement a déposé le 13 janvier 2021 le projet de loi prorogeant l'état d'urgence.

Celui-ci a été définitivement adopté le 9 février 2021. Il s'agit là du cinquième texte adopté concernant l'état d'urgence sanitaire. Si, dans l'ensemble, députés et sénateurs se sont accordés sur la nécessité d'accorder au gouvernement des marges de manœuvre pour faire face à l'épidémie, certaines modalités pratiques n'ont pas pu faire l'objet d'un consensus entre les deux chambres. Cela a conduit le Sénat à rejeter ce texte, notamment en raison de l'absence d'un contrôle parlementaire renforcé sur les restrictions apportées aux libertés des Français. Le dernier mot a donc été donné à l'Assemblée nationale.

Dans le détail, le texte adopté comprend six articles :

L'article 1er repousse, jusqu'au 31 décembre 2021, la clause de caducité du régime d'état d'urgence sanitaire. Cela signifie que l'état d'urgence sanitaire pourra être mis en place jusqu'à cette date. Cela ne signifie pas pour autant que celui-ci sera prorogé automatiquement : après sa déclaration initiale par décret en conseil des ministres pour une durée de quatre semaines, sa prorogation demeure conditionnée au vote du Parlement.

L'article 2 proroge, jusqu'au 1er juin 2021, l'état d'urgence sanitaire. Cet état d'urgence sanitaire permet de prendre des mesures de protection contraignantes. Il ouvre au Premier ministre la possibilité de prendre, par décret, neuf mesures expressément prévues limitant la liberté d'aller et venir, la liberté de réunion et la liberté d'entreprendre, aux seules fins de garantir la santé publique (restreindre ou interdire la circulation des personnes et des véhicules, interdire aux personnes de sortir de leur domicile, autoriser le placement à l'isolement des personnes affectées, fermer les établissements recevant du public, etc.). Le ministre chargé de la santé, quant à lui, peut prescrire, par arrêté, toute autre mesure réglementaire relative à l'organisation et au fonctionnement du dispositif de santé, ainsi que toute mesure individuelle nécessaire à l'application des mesures prescrites par le Premier ministre. Enfin, le Premier ministre ou le ministre de la santé peuvent habiliter le représentant de l'État territorialement compétent à prendre toutes les mesures générales ou individuelles d'application de ces dispositions. Concrètement, ce texte ouvre la possibilité pour le gouvernement de maintenir le couvre-feu, d'imposer le port du masque ou de limiter des rassemblements jusqu'au 1er juin 2021.

L'article 3 proroge, jusqu'au 31 décembre 2021, la mise en œuvre des systèmes d'information de santé. Concrètement, cet article prolonge la mise en œuvre de deux outils informatiques : d'une part, le système d'information national de dépistage (SI-DEP), pour centraliser l'ensemble des résultats des tests effectués, et, d'autre part, « Contact Covid », élaboré par l'Assurance Maladie, pour assurer le suivi des patients et de leurs cas contacts.

Compte tenu du caractère particulièrement sensible de ces traitements, de nombreuses garanties sont prévues, notamment s'agissant de la limitation du périmètre des données de santé pouvant être traitées ou la limitation des finalités poursuivies. En outre, les données ne peuvent être conservées à l'issue d'une durée de trois mois après leur collecte. Par exception, cette durée peut être prolongée pour la seule finalité de surveillance épidémiologique et de recherche.

Les articles 4 et 5, introduits par le Sénat, accordent des délais supplémentaires facultatifs aux organes locaux délibérants, afin de tenir compte du bouleversement engendré par la crise sanitaire dans la gestion de ces établissements, en :

  • portant de neuf mois à un an le délai dont disposent les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI-FP) pour adopter leur pacte de gouvernance (art. 4) ;
  • faisant courir, à compter du 1er octobre 2020, le délai pendant lequel la minorité de blocage peut se constituer pour s'opposer au transfert, à la communauté de communes ou la communauté d'agglomération, de la compétence en matière de plan local d'urbanisme, de documents d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale (art. 5).

Enfin, l'article 6 étend à Wallis-et-Futuna, à la Polynésie française et à la Nouvelle-Calédonie la prorogation du régime de l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 31 décembre 2021.

En revanche, un article prévoyant de proroger, jusqu'au 30 septembre 2021, le régime transitoire organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire a été supprimé par les parlementaires. Ce régime, proche de celui de l'état d'urgence sanitaire, permet aux autorités de l'État de bénéficier de pouvoirs similaires, à quelques exceptions près (comme le pouvoir d'interdire aux personnes de sortir de leur domicile), à ceux ouverts par cet état urgence.

Cet article a suscité de nombreux réserves et les parlementaires ont décidé de le supprimer, estimant que le régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire devra être de nouveau déterminé, par le Parlement en fonction de l'évolution de la situation sanitaire et des adaptations qu'elle exigera.

 

Par Camille Stoclin-Mille

Source : Projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire ; Projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire.

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