Adoption définitive de la loi ASAP devenue fourre-tout

La loi ASAP modifie le droit de la commande publique, celui de l'urbanisme, de l'environnement et même quelques règles du contentieux administratif.

Le Sénat, le 27 octobre, et l'Assemblée nationale, le 28, ont adopté définitivement le projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique (ASAP) dans le texte de la commission mixte paritaire (CMP). Ainsi s'est achevé le parcours chahuté d'un texte retardé mais aussi profondément modifié du fait de la crise sanitaire. Le projet du gouvernement comportait cinquante articles. Il en comptait quatre-vingt-six en quittant le Sénat le 5 mars et cent soixante-sept après son examen par les députés le 6 octobre.

 

Le seuil des marchés de travaux porté à 100 000 €

Parmi les ajouts au palais Bourbon figurent plusieurs articles modifiant le code de la commande publique. Ceux-ci visent notamment à faciliter l'accès à la commande publique des entreprises en difficulté mais aussi des petites et moyennes entreprises (PME). L'ensemble des marchés globaux devront réserver une part minimale de l'exécution à des PME ou à des artisans. Le pouvoir réglementaire pourra dispenser certains marchés de procédure de publicité et de mise en concurrence pour « un motif d'intérêt général ». En outre, jusqu'au 31 décembre 2022, les marchés de travaux pour répondre à un besoin dont la valeur estimée est inférieure à 100 000 € hors taxes pourront être conclus sans publicité ni mise en concurrence.

La loi ASAP crée également dans le code une série de règles applicables en cas de circonstances exceptionnelles pour la passation et l'exécution des marchés et des concessions. Elle rend applicables les dispositions du code de la commande publique relatives à la modification des contrats en cours d'exécution à ceux signés avant le 1er avril 2016. Enfin, les services de représentation légale d'un client par un avocat sortent du champ de la commande publique. Il en va de même des consultations en vue de la préparation d'une telle procédure.

 

Faciliter les implantations industrielles

Le projet de loi reprenait une grande partie des propositions du rapport Kasbarian pour faciliter les implantations industrielles. Ces mesures d'assouplissement de règles en matière d'environnement et d'urbanisme ont été amplifiées lors des débats. On peut citer ainsi la fin de l'application automatique de règles nouvelles aux projets d'installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE).

Lorsqu'un projet ou programme doit être soumis à concertation à la fois en application du code de l'environnement et du code de l'urbanisme, le maître d'ouvrage peut opter pour la première seulement. Les mesures réglementaires du code du patrimoine en vigueur lors de la date de réception du dossier du projet d'implantation industrielle s'appliqueront pour la suite des démarches relatives à l'archéologie préventive. Les permis et les décisions de non-opposition à travaux pourront, sous certaines conditions, recevoir exécution avant la délivrance de l'autorisation environnementale.

Les règles relatives à la participation du public et à l'évaluation environnementale en droit de l'urbanisme sont également revues. L'évaluation devient systématique pour les plans locaux d'urbanisme. En revanche, elle ne l'est plus pour les unités touristiques nouvelles (UTN). Seules la création ou l'extension d'UTN structurantes y seront soumise obligatoirement. En outre, les autorisations d'UTN dont la caducité intervient entre la publication de la loi et le 30 avril 2021 sont prorogées de six mois.

Le délai dans lequel les collectivités territoriales et associations concernées par un projet, un plan ou un programme peuvent demander l'organisation d'une concertation préalable est réduit de quatre à deux mois. En contrepartie, le préfet devra informer les régions, départements et communes sur le territoire desquels est prévu le projet. L'information reste facultative pour les associations, les autres collectivités et les groupements. La loi prévoit aussi une simplification des procédures applicables aux ouvrages réalisés par les collectivités territoriales dans l'exercice de leur compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations.

 

Contentieux des éoliennes en mer

Une série de dispositions visent à soutenir les énergies renouvelables. Parmi elles figure la possibilité d'exclure de la procédure de mise en concurrence l'occupation du domaine public de l'État pour l'exploitation d'une installation de production d'électricité à partir de sources renouvelables. Pour l'éolien en mer, les procédures de mise en concurrence pourront être lancées avant la fin du débat public ou de la concertation préalable. Le Conseil d'État devient compétent en premier et dernier ressort pour connaître des recours juridictionnels contre les décisions relatives à ces installations. De leur côté, les cours administratives d'appel deviennent compétentes en premier et dernier ressort sur les recours contre les décisions relatives aux projets d'ouvrage de prélèvements d'eau à usage d'irrigation.

La loi comporte enfin une série de dispositions de simplification très diverses. On relèvera ainsi la généralisation du dispositif Justif'Adresse, expérimenté dans quatre départements en application de la loi ESSOC. La justification du domicile lors de la délivrance d'un titre ou d'une autorisation peut se faire par consultation directe par l'administration d'un fournisseur de bien ou de service ou d'un service public. La loi étend également la procédure administrative d'expulsion des squatteurs à la résidence secondaire. Le préfet ne peut refuser de la mettre en œuvre que pour un « motif impérieux d'intérêt général ». Les établissements d'accueil de la petite enfance et les assistants maternels devront communiquer leurs disponibilités à la Caisse nationale d'allocations familiales, en vue d'une meilleure information des familles.

En matière de santé sont prévus un assouplissement des conditions du commerce électronique de médicaments par une pharmacie d'officine, la création automatique du dossier pharmaceutique – sauf opposition du bénéficiaire – et la simplification des règles de mise en œuvre des protocoles locaux de coopération entre professionnels de santé.

Habilitations à légiférer par ordonnance :

La loi ASAP donne au gouvernement plusieurs habilitations à légiférer par ordonnances. Celles-ci concernent notamment :

  • la modification des règles applicables à l'Office national des forêts pour élargir le recrutement d'agents contractuels de droit privé ;
  • l'organisation des chambres d'agriculture et le statut de leurs agents ;
  • la simplification et mise en cohérence des législations applicables aux modes de garde de la petite enfance. Sont notamment prévues des possibilités de dérogations s'agissant du nombre et de la qualification des adultes encadrant les enfants.

 

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