Succession d’un handicapé : opposition à l’action en récupération du département
Devenue handicapée à la suite d’un accident de la circulation, une personne a été hébergée dans un foyer d’accueil médicalisé du 1er juillet 2009 jusqu’à son décès le 22 septembre 2014.
Le 19 mai 2017, le président du conseil départemental du Nord notifie à la sœur de la personne décédée, en sa qualité d’héritière de la bénéficiaire, sa décision de récupérer sur la succession la somme de 270 654,47 € au titre de l’aide sociale versée pour la prise en charge de ses frais de séjour et d’hébergement dans le foyer d’accueil. L’héritière saisit alors la juridiction d’aide sociale compétente, sollicitant le bénéfice de l’article L. 344-5, 2°, du code de l’action sociale et des familles pour s’opposer au droit de recouvrement du département. Ce texte prévoit notamment que les frais d'hébergement et d'entretien des personnes handicapées accueillies dans un établissement spécialisé sont à la charge, à titre principal, de l'intéressé lui-même et, pour le surplus éventuel, de l'aide sociale sans qu'il y ait lieu à l'application des dispositions relatives au recours en récupération des prestations d'aide sociale lorsque les héritiers du bénéficiaire décédé sont son conjoint, ses enfants, ses parents ou la personne qui a assumé, de façon effective et constante, la charge du handicapé.
Sur ce dernier point, la deuxième chambre civile signale que « la charge effective et constante (…) s’entend d’un engagement régulier et personnel de l’héritier auprès de la personne handicapée, placée en établissement, tant d’ordre matériel qu’affectif et moral ».
L’héritière démontrait, en l’occurrence, qu’elle s’était occupée de sa sœur pendant les 25 années suivant l’accident. Cependant, la cour d’appel avait considéré que « cette assistance, qui relève de l’attachement familial et de la loyauté entre membres d’une même famille, ne peut avoir pour conséquence de faire échec à l’action en récupération exercée par le département ». La cour n’avait par conséquent que partiellement accueilli la demande de l’héritière, à hauteur de 90 000 €. Cette solution est censurée par la haute juridiction, qui laisse entendre que la piété familiale ne saurait faire échec à la pleine application de l’article précité.
Civ. 2e, 26 janv. 2023, n° 21-18.653
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